Etages et séries de végétation

Les plantes ne sont pas distribuées au hasard dans l’espace et leur extension altitudinale est soumise à tout un ensemble de facteurs convergents : édaphiques, climatiques et biogéographiques. L’altitude est un élément essentiel pour la zonation de la végétation avec des coupures de premier ordre qui sont les étages de végétation et d’autres de second ordre, les séries de végétation.

Le botaniste et biogéographe Henri Gaussen est à l’origine en France de la notion d’étages et de successions de la végétation, fondatrice de la phytogéographie.

Au fur et à mesure que l’altitude augmente, les forêts de feuillus laissent place à celles de conifères, eux-mêmes remplacés par les prairies d’alpage. Ces dernières finissent par laisser la place aux rochers nus éventuellement recouverts de neige. La faune évolue également avec la végétation et l’altitude.

L’absence dans les Pyrénées des essences chefs de files des séries de végétation de la zone intra-alpine (Pin cambre, Mélèze, Epicea) et de l’Aune vert est à l’origine d’une simplification physionomique des séries de végétation.

Le Pin à crochets joue un rôle fondamental dans l’étage subalpin des deux chaînes, mais du fait de l’absence des autres essences arborées il y a une simplification excessive : l’homogénéité physionomique masque l’hétérogénéité des conditions écologiques et du matériel floristique de l’étage subalpin dans les Pyrénées. 

En Andorre, le hêtre est absent, le sapin est rare. Le pin sylvestre domine dans l’étage montagnard, au-dessus de 1 900 mètres le pin à crochets devient le seul arbre.

Les landes sont constituées par le buis, le raisin d’ours, le genet cendré en exposition chaude et par le rhododendron et les myrtilles en ombrée. sur les deux types de versants le genévrier colonise les pentes suite à la déprise pastorale.

modifié ‘après J. Becat

. On trouve à une altitude et une extension différentes selon les expositions solà ou obac :

L’étage méditerranéen avec les chênes verts (Quercus ilex ssp rotondifolia).

Le chêne vert se trouve présent en Andorre par sa variété à feuilles rondes. Il est fréquent dans toute la basse Andorre sous influence méditerranéenne. Il constitue des fourrés associés au Buis. Sa présence est l’une des grandes originalités de la végétation andorrane, avec tout un accompagnement de plantes méditerranéennes. A Sant Julia de Lòria on trouve la Lavande et les cistes . On peut constater sa progression sur la soulane au-dessus des Escaldes, jusqu’aux derniers arbres à Encamp.

Chêne vert à feuilles rondes. Quercus iles subesp. rotondifolia, (Lam.) O.Schwarz ex Tab.Morais – Fagacées

Le  Chêne vert a un feuillage persistant à  feuilles, vert-bronze sur le dessus et à poils blancs sur le dessous (adaptation à la sécheresse). Il a une longévité de 200 à 2 000 ans. La floraison s’étend d’avril à mai. Il est pollinisé spécifiquement par les insectes, les glands sont dispersés par de nombreux animaux. C’est une espèce post-pionnière qui colonise les pentes exposées au sud jusqu’à 1 550  m sur les terrains calcaires (thermophile calcicole), il progresse sur les anciennes terrasses de culture abandonnées. On observe également cette formation végétale dans le massif du St Barthélemy en Ariège. 

Dans de très nombreuses traditions, le chêne vert représente la force. En catalogne on faisait passer les enfants sous les branches d’un chêne vert afin qu’il leur transmette sa force vitale.

Chêne pubescent. Quercus pubescentis, Willd. Fagacées

Sur les sols plus profonds on trouve également du Chêne pubescent également appelé Chêne blanc. Cette espèce se caractérise par la présence de trichomes, ces petits poils fins, sur la face inferieure de ses feuilles, d’où son nom “pubescent”.

Son tronc est souvent court et tortueux. Son houppier est ample et clair. Ses jeunes rameaux sont pubescents et grisâtres. Les bourgeons sont bruns, ovoïdes et pointus. Les feuilles sont alternes, glabres dessus, pubescentes-tomenteuses dessous et de couleur gris-vert ; le limbe à lobes triangulaires-oblongs mesure de 6 à 9 cm, le pétiole est long de moins de 2 cm. Les glands sont sessiles.

L’étage montagnard dominé par le Pin Sylvestre.

Létage de montagnard est dominé par les bois de pins sylvestre dans lesquels s’insèrent dans les endroits les plus frais, les bouleaux, les Trembles et les Frênes. Le buis (Buxus sempervirens) est l’arbuste dominant dans l’étage montagnard, comme sous-bois des forêts claires ou comme élément principal de landes qui recèlent des plantes méditerranéennes. Il colonise rapidement les pâturages abandonnés et les clairières.

Ce sont des forêts assez sèches notamment en soulane, à sous bois dominé par le buis et l’abondance de mousses qui recouvrent les pierres et stockent l’humidité. Au mois de mai on peut admirer les fleurs blanches délicates de l’Amélanchier.  Sur les zones les plus exposées au sud, le Raisin d’Ours domine. Cette forêt est dite supra-méditerranéenne, elle est caractéristique du versant sud des Pyrénées, avec des avant-postes sur le versant nord, dans les  Pyrénées orientales et en Ariège.

Pin sylvestre. Pinus sylvestris, L. – Pinacées

Le pin sylvestre est une espèce à grande amplitude écologique et climatique, notamment c’est l’une des plus importantes de la forêt boréale d’Eurasie. C’est un arbre élancé dont la longévité est en général de 150 à 200 ans. Il ne dépasse pas la plupart du temps, 25 mètres. Il se reconnaît notamment à la couleur orangée à gris jaunâtre de son écorce dans la partie supérieure du tronc. L’huile essentielle de pin sylvestre est tonique et hypertensive, et reconnue depuis Hippocrate et l’Antiquité grecque pour soigner les malades de l’appareil respiratoire.

L’étage subalpin où seul le pin à crochets est présent.

Les forêts de pins à crochets présentent une très grande diversité́, se rencontrant :

– dès l’étage montagnard (le Pin à crochets étant alors en mélange, introgressé́ avec le Pin sylvestre) ;

– à l’étage subalpin Pin à crochets généralement seul, mais le Pin sylvestre peut encore s’observer à l’état sporadique ;

– sur substrats siliceux ;

– sur substrats gypseux ou calcaires. Sur substrats calcaires, à l’étage subalpin, parfois les humus sont très épais et alors acides (la végétation est alors identique à celle des pineraies de substrats siliceux).

S’agissant de peuplements en situations sèches à très sèches, leur productivité est faible à très faible : environ 1 m/ ha / an ; les arbres sont très âgés

La limite altitudinale se situe vers 2 350 m, ce qui est exceptionnel. Au delà seuls des arbres épars se développent au grée des germinations.

On peut constater, à la limite des étages montagnards et subalpins, quelques pins présentant des caractères communs aux deux espèces, pin à crochets et pinsylvestre, tronc plus rouge, cône moins dissymétrique comme l’hybride décrit dans les Pyrénées centrales : le pin de Bouget.

Les landes progressent suite à la déprise pastorale.

Les landes sèches à Genévrier ou Genets, formations végétales particulières aux Pyrénées orientales,  se développent en soulanes ainsi que les landes à Raisin d’Ours. A l’obac les landes à rhododendron prédominent.

Les landes à Genêts purgatif constituent un habitat oroméditerranéen relativement rare et situé en limite d’aire de répartition.

Le genévrier commun (Juniperus communis) est un arbuste très plastique, qui s’adapte à toutes les situations. En fait, on le trouve en bord de mer dans l’habitat méditerranéen et, en Andorre, c’est le dernier arbuste  que l’on observe en altitude, jusqu’à 2700 mètres dans les rochers bien exposés. Les arbustes qui composent cette lande supportent des sècheresses estivales comme des froids intenses en hiver. 

 Des conditions situationnelles particulières imposées par un balayage important des vents saisonniers du sud  combiné à l’ensoleillement, entraînent un déneigement précoce. Ce qui cause de grands écarts thermiques et favorise ledessèchement.

La dynamique de ces landes dépend de la nature du substrat et de l’intensité des facteurs intervenants (sécheresse, température et luminosité).  Ces landes sont dominantes en raison essentiellement de leur faculté́ de colonisation : de leurs espèces très sociales et de croissance rapide. 

De l’ombre des forêts à la lumière des pelouses.

La question de la limite altitudinale des forêts est un exemple de la difficulté que peut présenter l’analyse d’une grande transition écologique : c’est la notion d’écotone.

Aujourd’hui, la simple observation indique, qu’après seulement trois à quatre décennies de déprise pastorale, la limite de l’arbre gagne en altitude.

La limite des arbres en altitude n’est pas seulement déterminée par des facteurs climatiques ou plus généralement géographiques, mais elle dépend aussi considérablement de la biologie : nature et diversité́ des espèces forestières en limite, physiologie et possibilités adaptatives de chacune d’elles, action humaine présente et passée, histoire de la végétation.

En général, aussi bien en altitude qu’en latitude la limite des arbres érigés correspond à l’isotherme 10° en juillet.

La limite supérieur des arbres est appelée « zone de combat », Cette zone est généralement très riche en biodiversité, car elle abrite des espèces propres à ce milieu de transition, mais aussi des espèces appartenant à chacun des écosystèmes le bordant.

On passe ainsi de formations végétales fermées plus ou moins en équilibre : le climax, à des formations ouvertes où la compétitions pour occuper l’espace est très forte puis à des formations en mosaïques où les conditions de milieux conditionnent la répartitions des plantes. En fait, les pins ne s’implantent pas au hasard, les plantules se développent dans les zones où la neige ne subsiste pas trop longtemps et sur les parties les plus rocheuses pour éviter la compétition avec les herbacées et les glissements de la neige.

L’étage alpin.

Siège d’une forte biodiversité, souvent endémique, l’étage dit alpin présente la juxtaposition d’espèces végétales fortement adaptées (plantes en coussinets, résistantes au froid et au vent) ou au contraire opportunistes, dans les lieux les mieux exposés.

L’étage alpin marque une limite des arbres, on ne trouve plus d’arbres ni d’arbustes feuillus ou résineux (hors arbrisseaux prostrés et certaines espèces adaptées, telles les saules nains).

Une importante controverse affecte la définition de l’étage alpin, dont la limite basse est définie soit comme la limite théorique de la forêt, et soit comme sa limite réelle (ce qui peut conduire à des écarts de près de 500 m d’altitude). Dans le cas d’une limite naturelle de la forêt, il apparaît que la plupart des biotopes de pelouses visibles dentre 2 000 et 2 500 m, domaine des troupeaux de vaches et de moutons, constituent des biotopes subalpins dégradés et non des biotopes alpins